jeudi 5 mai 2016

Un texte de Gillian GENEVIÈVE (Île Maurice).

Je n'aime pas que le bleu du ciel éclabousse le gris du temps et le silence feint de ce mois de mai.


Je n'aime pas les mensonges de ce jardin des vivants emmuré aux quatre coins des vents.


Ici, règne l'ennui, l'art défait d'une pensée en berne; là, règne le murmure de ce jour distordu par les relents de la paresse et de la servilité;


Et, je suis pris au milieu de l'impartageable lumière, à la place de Dieu, englué dans les mots, ces méandres et le leurre du vécu;


Et, je suis pris dans le refus du hasard, ce temps volage à hauteur d'homme, parachevant l'histoire dans des bains de sang;


Et, je suis pris, soldat inconnu, à l'abri des causes et de la foi, dans cet instant faussement lisible, la plume et la mémoire vacillant au bord de la page blanche;


Et, je suis pris à la dérive du sens et de la nuit, le visage inanimé, le regard éteint, l'ombre inscrite dans la pierre, en absence du soleil et de l'été.


Il fait froid ce soir et je relis mes mots, royaume corrompu d'un cœur fatigué. Ma parole est à l'image des arbres: sans chair et inutile.


Mais, j'ai écrit ce poème, sans remords, pour fissurer le mur des temps et m'offrir, amorphe, sous les feuillages d'un amour perdu, au règne du récit et des illusions.


Toi qui me lis, sache que je n'appartiens plus au jardin des vivants; je remonte au fil des mots vers le silence et l'oubli.


Toi qui me lis, sache que je fus un homme.


Aujourd'hui, j'écris.












Gillian GENEVIÈVE.


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