jeudi 27 mars 2014

Un peu de réflexion...

Les désirs et les passions déforment le monde.




L’abondance rend les gens orgueilleux, égoïstes. Plus on a, plus on veut ; plus on se focalise sur ses propres besoins de  sécurité et de plaisir ; moins on supporte les privations, les contraintes et…les partages.




Alexis de Tocqueville ne s’était pas trompé : « Je vois une foule innombrable d’hommes semblables et égaux qui tournent sans repos sur eux-mêmes pour se procurer de petits et vulgaires plaisirs, dont ils emplissent leur âme . Chacun d’eux retiré à l’écart, est comme un étranger à la destinée de tous les autres : ses enfants et ses amis particuliers forment pour lui toute l’espèce humaine ; quant au demeurant de ses concitoyens, il est à côté d’eux, mais il ne les voit pas ; il les touche et ne les sent point ; il n’existe qu’en lui-même et pour lui seul […] ».
Quelle analyse prophétique ! En lisant ces mots, je crois voir, devant moi, le portrait de la foule que je croise dans le métro parisien chaque jour ; j’identifie la figure du bobo, du « middle-class man » dans toute son inconscience et dans toute sa « splendeur » nantie, sécure, naïve, pleine de suffisance plus ou moins affichée.
Il parait que ce serait là la marque du triomphe de la démocratie ; qu’elle éloignerait, neutraliserait le spectre de la Révolution ; qu’elle constituerait le fin du fin, l’achèvement de la « sagesse des peuples ».
Sauf qu’en définitive, la logique de cet idéal d’embourgeoisement massif, de nivellement par l’abondance finit elle aussi par menacer d’annuler la démocratie vraie. Comment voter, comment s’engager dans des partis, des associations dès lors qu’on ne se sent plus concerné par le  collectif, par les plus vastes horizons ? Quelle autre solution que de laisser le pouvoir, la responsabilité, l’ « engagement » aux mains d’une toute petite caste de « spécialistes de la gouvernance », le plus souvent des technocrates ?
Et puis, avec la mondialisation, le problème des oppositions, des luttes de « classes » ne fait que se reporter. Il prend désormais la forme d’un contraste, d’une opposition entre pays et continents pauvres (dits « du Sud »)   et pays et continents  riches et « développés » (dits « du Nord »). Entretenir l’abondance idyllique, pléthorique, monstrueuse  de certains, de ceux qui ont pu se frayer un chemin vers ce système proposé en idéal au monde entier pille les ressources de l’ensemble de la planète. Si l’ensemble de l’humanité accède à un pareil niveau, qu’en sera-t-il de l’équilibre écologique, déjà fort fragile et fort mis à mal ? On n’ose, bien sûr, y songer. Sans compter que les besoins et désirs donnent  souvent – si ce n’est toujours- lieu à un « effet boule-de-neige » : le progrès s’emballe et ses exigences matérielles avec lui ; la demande devient insatiable…
Les classes moyennes et bourgeoises de tous les pays – et, en particulier, bien sûr, celle des pays prospères du G8 – vivent comme si tous ces dangers-là n’existaient pas, en « faisant l’autruche ». C’est logique : tout ce qui n’apporte pas le bonheur, le plaisir, est à proscrire, à écarter.
Mais qui paiera la note de tout cet égoïsme, de tout cet hédonisme ?
Cet individualisme décrit par Tocqueville a quelque chose de malsain, de dangereux. Il ne fait que rétrécir l’horizon de milliers, de millions de personnes, qui ont pourtant tout pour « penser », pour être davantage conscientes, pour se comporter de façon plus « éclairée », plus adulte. Il contrecarre, voire il annule les effets libérateurs pour l’être que pourrait  (s’il était bien utilisé)  avoir le progrès technologique dans sa dimension de vecteur de circulation de l’information.
On s’ « amuse », oui…mais ne danserait-on pas, en fait, sur un volcan ?




Chez l’Homme, énormément de choses s’expliquent par son mimétisme.




Chaque phénomène a une multiplicité d’explications, selon l’angle que l’on a adopté pour l’aborder et selon la grille d’interprétation qu’on lui applique.
Exemple : la perception de l’artiste n’est pas celle du mathématicien et/ou du scientifique, pas plus qu’elle n’est celle du philosophe, du sociologue ou de l’économiste. La « pensée » humaine a acquis un caractère foisonnant qui, à présent, fait qu’on en cherche en vain l’unification ultime.
C’est l’un des facteurs qui font que tout « absolu » de la connaissance se trouve voué à l’échec.
Plus les neuroscientifiques creusent le fonctionnement de notre cerveau, plus ils s’aperçoivent que celui-ci « décide » de ce qu’il va percevoir, et de comment il le percevra. La conscience humaine ne serait ainsi qu’une question de « sélection », de « volonté » - au reste inconsciente – de percevoir, de se souvenir, etc.




La gloire rend prétentieux et le pouvoir, mégalomane. Ce sont tous deux des tours d’ivoire.




Un éducateur, cela a toujours plus ou moins le mauvais rôle, dans la mesure où ça a souvent la tâche ingrate d’empêcher celui/ceux qu’il éduque de faire, ou d’avoir tout de suite ce qu’il/ils désire(nt).




L’art est fou. D’une folie qui part dans tous les sens.
Et c’est là la meilleure de ses qualités.




C’est sa complexité qui fait de chaque Homme un être éminemment « précieux ».
En effet, pour connaitre en sa totalité un être humain, une seule existence, voire peut-être même plusieurs, n’y suffirai(en)t point.
Si l’on y réfléchit bien, nous pourrions, toutes et tous autant que nous sommes, aisément être comparés à ces montagnes de glace qui flottent dans les eaux polaires : une partie émergée, ne représentant qu’un seul tiers de l’ensemble, tout le reste se trouvant immergé au-dessous de la ligne de flottaison et donc, invisible.
Chaque mort d’un proche est, pour nous, occasion de nous questionner : « qu’ignorais-je de lui, ou d’elle ? – jusqu’à quel point le/la connaissais-je dans le plein sens du terme ? – qu’est-ce qui de lui/d’elle, m’a échappé, m’est resté opaque, impénétrable ? ».
Autre mystère – qui revient, d’ailleurs, au même : lorsque nous songeons à notre propre « départ » : « quel souvenir leur laisserai-je ? Dans quelle mesure ne sera-t-il pas distordu, incomplet, tronqué, réducteur ? ».
Car, tout aussi bien, nous sommes, tout au long de notre vie, les proies des miroirs déformants que nous sont nos semblables.




L’idée que les femmes rendent le monde plus humain et plus habitable, développée notamment dans le mythe de La Belle et la Bête, est tout sauf absurde. Un tel scénario ne s’observe-t-il pas déjà chez deux groupes de grands primates plus « primitifs » que nous mais très voisins du nôtre, sans doute très proches par leur organisation et leur mode de vie du mode de vie qui devait être celui de nos lointains ancêtres – je veux parler des chimpanzés et des bonobos, chez lesquels les femelles, en sus de leur fonction d’élevage des jeunes, semblent exercer un rôle marqué dans l’arbitrage des conflits, dans la régulation des tensions et, donc, dans la pérennité du groupe de singes ?
L’origine de toute société n’est-elle pas à trouver, avant toute autre chose, dans la force du lien existant entre le jeune primate et sa mère ?
Qu’eut été le monde humain laissé à la seule violence de la testostérone ? Serions-nous seulement encore là, en ce moment même, pour en parler ?




La misogynie est la manière qu’ont trouvée les jeunes garçons puis les hommes de se souder entre eux et de se sentir exister collectivement.




Les hommes ne demandent pas aux femmes de participer à la culture. Ils leur demandent juste de les admirer et de les soutenir. De s’  « oublier »  totalement pour eux, dans une sorte de continuation de ce qu’elles font tout naturellement pour leur progéniture.
Exactement comme si, somme toute, ils n’avaient pas réussi à grandir !




Il faut sortir de ce système mental qui associe la femme aux forces de la nature et l’homme à tout ce qui est d’ordre culturel.




Chacun, désormais, doit s’habituer plus ou moins à vivre dans un monde où personne ne l’aimera jamais assez pour abdiquer les prérogatives de son propre moi pour lui.




L’immobilisme  d’une société, ses lourdeurs comme ses consensus, ce n’est souvent qu’une question toute bête  de lâcheté, ou de fatigue.
Œuvrer pour que le monde devienne meilleur, cela demande un effort. Et non des moindres.




Il y a un mot avec lequel la France, dans le fond de son âme, semble fâchée, c’est le mot « pluralisme ».
Eradiquer toutes les différences en « éduquant » le bon peuple à la façon de l’Eglise catholique romaine, de l’Etat royal bâti par Philippe-Auguste, Louis XI et Louis XIV ainsi que par les Jacobins porteurs de l’universalisme chauvin (étrange, d’associer ces deux mots-là, n’est-ce pas ?) des Droits de l’Homme, c’est l’alpha et l’oméga, la raison d’être de la « mystique » française, dont les piliers sont l’humanisme et une morgue de « peuple élu ». La France a, en un certain sens, horreur de la démocratie. Ne doit-elle pas sa naissance à sa sacro-sainte « Histoire », qui fut d’éducation dans l’éradication ?
Des « réactions » telles celles de Napoléon, de Pétain ou de la « lepénisation » actuelle des esprits hexagonaux n’ont rien d’étonnant, dans un tel contexte. « Rassurer » les Français, c’est leur donner ou leur restituer un Etat fort, monolithique, qui maintienne la rigidité des traditions et des repères bien établis.
A bien des égards, l’identité nationale française repose sur un lourd substrat royal, bourgeois et catholique, lequel s’accommode très mal des mutations et bouleversements où se trouve entraîné le monde actuel.
Il y a, incontestablement, un poids d’histoire et de tradition qui leste ce pays, où la tentation de « faire l’autruche », de jouer à l’île, de faire retraite vers la nostalgie et autres cultes passéistes (et dépassés) est toujours étonnamment forte.




Il est tellement difficile de se connaître, de se reconnaître !
Comme nous éprouvons, tout d’abord, l’impérieux besoin de nous aimer, d’entretenir une bonne opinion de nous-mêmes, nous aimons à penser que nous sommes au-dessus de toute remise en cause, de toute critique. Nous détestons, dans notre évaluation de nous-mêmes, avoir à prendre en compte nos propres travers, nos propres carences.
Nous voulons paraître à notre propre avantage à nos propres yeux. Aussi minimisons-nous, quand d’aventure, nous y pensons, frénétiquement l’effet de nos faiblesses, de nos manques, de nos sales habitudes, de nos tendances défectueuses et négatives de tout poil pour ne garder à l’esprit que les tendances qui nous flattent, qui sont le plus à notre honneur.
A force de vouloir être parfaits, nous croyons l’être – ce qui est absurde.






P. Laranco.

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