samedi 19 octobre 2013

Un texte de Patricia LARANCO (Île Maurice / France) : " ODEUR DE TERRE ".

La terre humide retournée.
Odeur noire, puissante, grasse, qui soûle. Mottes, sillons grumeaux en désordre. Qui, sans mesure, exhalent leur suint. Le suint glaiseux de leur sueur. De leurs sécrétions pesantes, sourdes, moisies.
Fumet sauvage, étourdissant. Qui parle d'essentialité. De lourds secrets des profondeurs. De chtoniennes macérations.
Comment nos narines le manqueraient-elles ?
Il les assaille, les heurte de plein-fouet. Réveille leur exaltation.
J'ai toujours aimé ce parfum.
Sa vigueur venue de l'En-bas.
Son évasion hors du terreau.
A la seule faveur d'une brèche.
La terre fracturée, violée. Par quelque bêche, ou quelque houe.
Par quelque jardinier planteur.
La terre exposée, mise à nu. Exposée à l'espace, à l'air. Qui laisse monter ses senteurs. Pour clamer son omniprésence.
On n'a pas l'habitude de ça. Cela nous surprend toujours un peu. Peut-être...parce que c'est trop brutal. Trop fort. Parce que ça nous réveille.
Comme un rappel matriciel. Mais aussi, un rappel tombal. Effluve de début, de fin. De chair exaltée...et de boue. Souffle de caveau et... d'eau, d'humus...de champignonnière, de racines torses...de sève cachée, souterraine, qui court; inépuisablement en réserve.


Patricia Laranco.


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